Deux justices particulières, en marge de la justice de droit commun, sont à mettre à part pour leur longue existence qui s’est achevée dans la seconde moitié du 20e siècle. L’une se caractérise par son ressort très particulier et en même temps immense, celui des colonies. L’autre par une compétence d’attribution qui lui a réservé les crimes et délits commis par les membres d’une société à part, la société militaire. La première a disparu avec la décolonisation après plus d’un siècle d’expansion parallèle à celui de l’Empire colonial. L’autre a cessé d’exister en 1982 quand le contentieux militaire a été rendu à la juridiction de droit commun, du moins en temps de paix.
- La justice militaire a suscité de nombreuses polémiques, particulièrement lors de l’affaire Dreyfus et au lendemain de la première guerre mondiale quand l’opinion a pris connaissance des condamnations pour l’exemple prononcées pendant la guerre. Le privilège de juridiction dont jouissent les militaires, remis partiellement en cause au début de la Révolution, a été confirmé dès le Directoire. Pendant plus d’un siècle, les conseils de guerre (document commenté) ont été l’instrument du commandement pour régler les conflits internes, maintenir la discipline et sanctionner les délits commis par les militaires. C’est seulement à partir de 1928 que des magistrats civils feront leur entrée dans les tribunaux militaires et encore leur place est-elle souvent remise en cause pendant les périodes de guerre, y compris jusqu'à la guerre d’Algérie.
- La justice coloniale, développée à partir du modèle métropolitain en présente un miroir infidèle (document complémentaire), même dans les colonies les plus anciennes (aujourd’hui territoires et départements d’outre-mer) où il faudra beaucoup de temps pour que les particularismes disparaissent dans leur organisation judiciaire. Dans les pays plus tardivement colonisés, les tribunaux s’adaptent plus ou moins bien à l'étendue de leur ressort, à la pénurie en personnel, comme à la tutelle des gouverneurs et aux contraintes d’une politique d’assimilation qui a évolué, à des rythmes variés, au cours d’un siècle ou moins - selon les territoires - de domination coloniale. Les “nécessités” locales comme l'éloignement de la métropole ont d’ailleurs souvent conduit à des expérimentations dont plusieurs seront reprises, ultérieurement, lors des réformes de la justice en France, comme le juge unique et l’extension de la compétence du juge de paix.